L'audience en détail, c'est ici !
Parlons des choses vraies de l'article du Télégramme pour ce qui est de l'audience du 4 février 2022, au Tribunal Administratif de Rennes, dans le cadre du recours électoral. L'article est visible sur ce lien.
L'article pourrait dire vrai s'il ne relatait pas que des 10 premières minutes de l'audience, sur les 3/4 d'heure.
Il est vrai que Madame la Rapporteure Publique a "démonté" notre requête. Vrai a Rapporteure Publique a été très critique. Mais il y a eu une méprise. Si vous prenez le temps de lire, vous comprendrez où elle se situe.
Comment ça marche le contentieux électoral
Une tension dans les tribunaux
Pour ceux et celles qui suivent l'actualité judiciaires de notre pays, les magistrats sont en colère contre le gouvernement qui leur enlève des moyens, au même titre que les hôpitaux, ou l'enseignement ... Les magistrats se mettent en grève et sollicitent les avocats pour qu'ils rejoignent leur mouvement.
Les délais sont écrasants, les tribunaux explosent de dossiers et les magistrats doivent faire vite, vite et particulièrement vite suite à l'engorgement lié au COVID. Il faut assister aux audiences pour palper la tension et briser là net toute illusion de "justice" concentrée. Ca, c'est dans les films ... Ces hommes et ces femmes ne sont là que deux jours par semaine et n'ont pas les moyens. Et ce n'est pas "contre nous" que le Tribunal a avancé sa délibération, mais dans un soucis de timing surréaliste.
L'autre 3/4 de l'audience ...
Pour ce qui est de notre affaire, je vais parler de la seconde partie de l'audience, dont les journalistes N'ONT PAS DIT UN MOT, c'est a dire les 3/4 de l'audience.
MADAME LE RAPPORTEUR PUBLIC & LE FONCTIONNEMENT DU TRIBUNAL
Voilà, le premier quart de l'audience est posée : madame la Rapporteur Publique a donné son avis, qui il est vrai, est généralement suivi. Quelques jours plus tard, s'en suivra un vote :
- deux personnes votent, dont le président, pas le rapporteur qui représente un avis consultatif
- si les deux personnes ne sont pas d'accord, le président ne "compte pas double" mais une troisième personne intervient, qu'on appelle "la balance", qui, comme son nom l'indique, fait pencher le vote
Voilà. On pourrait dire, "bah voilà, hop c'est bâché", comme ont dit les journalistes finalement.
MAIS !
Contrairement à l'impression que donne les articles du Télégramme et de Ouest France, beaucoup d'avocats ne sont pas présents à ces audiences. Ce sont des procédures dites écrites. Voici un extrait de la convocation à l'audience, pour preuve :
L'intervention orale a pour but de donner des observations, pas des plaidoiries. Il n'y a pas plus d'avocat général, mais un "rapporteur public". Au final, les observations ressemblent à des plaidoiries, à la différence prêt, enfin d'après ce que j'en ai vu, que les arguments restent plus proches du droit que de l'interprétation "humaine".
Par contre, je tiens vraiment à vous partager quelque chose qui m'a énormément interrogée :
- En introduction, la Rapporteur Publique a expliqué aux magistrats ce qu'étaient des élections partielles complémentaires, en précisant "dans les petits villages, ça marche de façon particulière". Cela signifie que ceux qui vont juger ce recours, ne savaient pas en réalité ce à quoi correspond des élections partielles ? Eux, magistrats au tribunal administratif où se jugent des affaires relevant de nos institutions ?
=> Réponse : ces magistrats ne sont pas tenus de faire l'Ecole de la Magistrature. Avoir fait "une grande école" suffit, comme l'ENA.
- S'en est suivie un discours qui a démonté le contenu de notre recours. Je cite la Rapporteur publique : "se reposer sur le principe de la liberté d'exprimer sans entrave son opinion pour dénoncer la présence des gendarmes, j'aurai aimé lire plus pertinent" !
=> En fait, les griefs que nous avons annoncé sont apparus tellement "hors norme" pour le Tribunal, qu'ils n'ont au début pas été crus, tant ils étaient sérieux. Il a fallu que j'explique que les gendarmes étaient là toute la journée, et non juste une demi heure comme a répondu la défense de Monsieur le maire et ses partis, et ont empêché toute surveillance du scrutin de la part des candidats de l'opposition.
Les magistrats se sont regardés et nous ont ensuite autorisés à produire une note en délibéré pour en apporter la preuve. Ce que nous avons fait, avec 12 heures de retard.
Ensuite, Madame la Rapporteure Publique a mis en avant un grief qu'elle considère tout à fait critiquable : "Dans des petits villages avec si peu d'habitants, des élus qui tractent avec leurs candidats, cela peut influencer les gens. Les élus inspirent confiance".
En Ploucardie, on vote pour le cousin et le voisin ?
Je pense pourtant que ce qui est valable de son point de vue en campagne, l'est tout autant en ville et même à Paris (mention spéciale pour Monsieur le journaliste du Télégramme qui souligne qu'on ait pris un avocat "parisien" (qui est "ch'tit pour sa gouverne, avec un nom du nord, l'équivalent de Le Goff ici par exemple ...). Dnas les grandes villes, il est tout aussi facile pour un candidat de descendre dans la rue et de sentir les fesses d'une poule sur un marché populaire, pour être le pote de tout l'arrondissement, même si le candidat prévoit de raser ce marché sur son programme !
Alors quoi ? Sur une grosse demi heure, on va dire que tout s'est joué dans les dix premières minutes ? Oh que non, mais ça ... les journalistes n'en ont pas écrit une ligne.
Puis, de fut à mon tour de parler.
J'avais noté un à un ses motifs de rejet. Certes il manquait des pièces. Nous avons eu 5 jours pour tout faire : trouver l'avocat, qu'il rédige, produire les pièces ... La défense elle, auran 1 mois et trois semaines pour répondre. Elle rendra ses écrits pourtant avec 3 jours de retard !!!
Si vous avez lu jusque là, je vous invite à lire la suite ...
LES ARGUMENTS DE REJET DU RECOURS
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Puis l'article du maire publié la veille ...
Un grand moment !
Madame la Rapporteur Publique a estimé que la publication d'un tel article, annonçant la possible disparition de la commune, ne méritait pas un droit de réponse de la part des autres candidats.
Il faut pourtant savoir qu'en droit (je résume), aucun argument politique conséquent ne peut être annoncé publiquement sans que les autres candidats n'aient le temps de répondre.
Une telle publication la veille des élections quand le délai des propagandes est clos, c'est étrange d'entendre que de tels propos n'ont pas de fond politique.
Mais avec du recul, je crois surtout que c'est un avis personnel, car en droit, NOUS N'AVONS ÉTÉ RECALÉS SUR RIEN.
Il y a encore un an, j'entendais des choses hallucinantes sur les pratiques du maire. Honnêtement, je ne prêtais pas attention car je n'y croyais pas. Et je pense sincèrement, que le Tribunal a mis en bémol, estimant que nous n'étions que des "candidats malheureux" comme l'ont écrit les journaux, et non des portes paroles qui cherchent à faire en sortie que dans les villages comme dans les grandes villes, les fraudes, abus, sont tout aussi graves, même si cela touche moins de gens et que les montants annoncés sont moins vertigineux. L'État de droit, il est national et également en zone rural. En principe du moins ... et il est vrai, qu'à leur place, j'aurai peut-être souri devant de tels griefs, pensant à des "conflits ce clocher". J'ai découvert avec stupeur, que justement parce que les zones rurales sont délaissées, comme les banlieues peut-être, on voit arriver toute une faune de "délinquants", aux méthodes tout à fait comparables aux grandes zones urbaines.
Reprenons ... Comme je suis attentive aux appréciations de Madame le Rapporteure Publique, j'ai pris bonne note de toutes ses observations et une a particulièrement attirée mon attention : en Ploucardie, le fait de voir des élus tracter avec des candidats pouvait être suffisant pour orienter le vote des gens .
J'ai donc rappelé les propos de Madame le Rapporteure Publique :
- "Madame j'ai bien pris note de vos propos au sujet du pouvoir d'influence qu'auraient des élus présents au côté des candidats, aussi, je m'étonne que vous ne reconnaissiez pas l'influence d'une publication du maire la veille des élections, qui annonce la disparition de la commune s'il ne retrouve pas sa majorité, alors qu'il a empêché de porter à la connaissance des habitants sa destitution de tous ses pouvoirs".
Malaise. On aurait pu le toucher ce malaise.
Alors Madame le rapporteur me répond :
- "Mais l'article donne la parole à toutes les parties, l'article est donc équitable".
Et voilà ... il a échappé auTribunal que non, l'article a donné la parole à 3 listes sur 4. Là encore, nous n'avons pas eu droit au chapitre.
Nous sommes arrivés en seconde place, malgré ces erreurs assez incroyables de la presse. Déjà le Ouest France avait annoncé seulement 3 listes dans un article précédent. Le journaliste m'a précisé au téléphone que c'est la mairie qui lui avait donné l'information. A croire qu'on a inquiété tout le monde avec notre petite liste ! On aurait voulu nous rendre les élections impossibles qu'on aurait pas fait mieux !
Mais reprenons l'audience ...
Donc Madame la Rapporteure Publique a transcrit la réplique en défense de l'avocat des adjoints du maire : "les gendarmes sont restés une demi-heure parce que le maire a constaté un rassemblement de candidats", qui se sont faits piéger, ça c'est ma profonde conviction.
Le président qui conclura l'audience, a souligné que si les gendarmes étaient présents toute la journée, et que j'apportais des éléments allant dans ce sens, ils feraient le point. Ces éléments, je les ai obtenu le dimanche, il ont été produit lundi après midi au Tribunal, qui a avancé malheureusement sa délibération.
MAIS TOUS CES ARGUMENTS ET PIECES SONT AUJOURD'HUI ENREGISTRÉS AU TRIBUNAL ET LE DOSSIER EST TOUJOURS OUVERT.
Jour de scrutin : le bal des vendus
OÙ ÉTAIENT CERTAINS DES DÉSOLIDARISÉS ?
Il faut quand même savoir qu'assister aux élections en tant qu'élus, n'est pas "une option", mais une obligation.
J'ai reçu un appel le dimanche soir 9 janvier de Madame Charrier, au cours du quel elle reconnaît ne pas avoir obtenu jusque là de permis de construire, parce qu'elle ne donne pas satisfaction au maire. Puis elle reconnaît ne pas se présenter aux conseils et aux élections, je la cite, "parce qu'elle n'en a pas envie".
Quand des candidats de l'opposition, moi compris, nous nous sommes présentés à la mairie pour être observateurs, il faut savoir que la mairie nous a refusé ce droit élémentaire ! C'est une violation des droits démocratiques les plus fondamentaux.
Donc, en réponse aux observations de Madame la Rapporteure Publique, j'ai fait ce que Messieurs Monsieur Henry et Cotten n'ont pas fait. J'ai rapporté de graves infractions au code électoral :
- "je réponds aux observations de Madame la Rapporteur publique : l'annonce des gendarmes avait été annoncée la veille, publiquement par le maire et par voix de presse. J'ai également précisé qu'étant donné la parution papier la veille, l'interview du maire devait dater d'au moins l'avant veille !
Enfin, j'ai précisé que des photos des forces de l'ordre ont été prises, prouvant ainsi que les gendarmes étaient là, postés devant la salle polyvalente, du matin au soir.
Le président de la Cour me dit ne pas avoir lu dans l'article un mot sur la présence des gendarmes.
Je me suis permise de contredire le Président de la Cour et j'ai pu lire publication du journal. Un autre détail que n'avait pas vu Madame le Rapporteure Publique.
A moins d'être devin, le journaliste n'a pas pu prédire la venue des gendarmes le lendemain, et n'a d'ailleurs aucune légitimité pour se prononcer sur leur venue. Par conséquent, il relatait bien des propos du maire.
GROSSE INTERROGATION SUR LA RETRANSCRIPTION DE CETTE AUDIENCE PAR LA PRESSE LOCALE
Il n'y avait que 3personnes dans la salle au moment de notre audience : une femme, un jeune homme qui m'a semblé plutôt être un étudiant et un autre homme.
Tout ce que je viens d'écrire, la presse n'en a non seulement pas écrit un mot, mais a surtout menti : nous n'avons pas été "déboutés".
Si cela vous a étonné, alors lisez la suite, cela vous étonnera encore plus !
La note en délibéré avec les justificatifs de notre recours qui a été accepté, c'est ici !